Publicité

Diamil Faye crache encore le feu. Toujours droit dans ses bottes et fidèle à sa liberté de parole, le patron de Guédiawaye Fc dénonce les agissements de la Ligue sénégalaise de football professionnel et demande à son président, Saër Seck, de rendre le tablier, au profit «de quelqu’un qui n’est d’aucun club», comme Pape Diouf, l’ex-président de l’Olympique de Marseille. Dans cet entretien qu’il a sollicité, le dirigeant fustige le «conflit d’intérêts» qui mine la Lsfp et appelle les clubs à prendre «leur courage à deux mains» pour crever l’abcès.

Publicité

Vous avez sollicité cet entretien. De quoi vous voulez parler ?

Quand on m’a interpellé la dernière fois sur la question, j’avais refusé (d’y répondre), me disant qu’une procédure était en cours. Je pensais que les gens reviendraient me rendre compte de ce que cette audition avait donné. Aujourd’hui, à une journée de la fin du Championnat, que tout le monde sache que les choses n’ont pas évolué et qu’on ne nous prenne non plus pour je ne sais quoi. C’est pour cela que j’ai voulu édifier l’opinion pour dire que je trouve anormal le cas de notre match contre Diambars à l’aller (0-0, 12e J.) – et on vient de jouer le retour (0-0, 25e J.). Symboliquement, ça pose problème. Cela veut dire qu’il s’est passé presque 13 journées. J’ai fait des déclarations, interdit que le match soit filmé (celui contre Diambars au stade Amadou Barry, le 17 février 2016, Ndlr), j’ai été auditionné et cela fait 4 mois que je n’ai pas vu de Pv (Procès-verbal). Je trouve que c’est anormal et cela pose encore le problème de la gestion de cette Ligue professionnelle que je dénonce encore.

A quoi est dû ce problème de gestion, un manque de compétence ?

C’est un ensemble. Diriger, c’est aussi prendre des décisions. Quand une Ligue est incapable d’en prendre, cela pose effectivement un problème de compétence et de complaisance. La Lsfp, c’est plus ou moins une Ligue de présidents et d’amis où on dit : ‘’Tu ne me fais pas de mal, je ne te fais pas de mal et on avance.’’ Quand on est capable de rapidement prendre une décision sur le match NGB – Gorée (0-2, 24e J.) et de mettre un huis clos pour NGB (25eJ. contre USO), alors qu’un dossier pend depuis 4 mois et qu’on n’a rien décidé, cela pose problème. Mais ce n’est pas la première fois. Souvenez-vous, quand il y a eu le décès du jeune Ibrahima Gningue (l’année dernière), la Ligue avait déclaré avoir diligenté une enquête et qu’il allait y avoir des sanctions. Il n’y en a jamais eu. Encore une fois, on fait dans la complaisance. Quand j’entends dire qu’on ne va pas donner le trophée (de champion de Ligue 2) de Teungueth Fc sur la dernière journée, cela ressemble à quoi ? Il est temps que les gens prennent leur courage à deux mains et qu’on règle ce problème de conflit d’intérêts qui mine cette Ligue. Trop c’est trop !

«J’aimerais bien qu’on réfléchisse à la possibilité de mettre quelqu’un comme Pape Diouf (…) et lui demander de nous gérer en transition cette Ligue, pendant deux ans, avec des gens autonomes»

Vous faites allusion à quoi, quand vous parlez de conflit d’intérêts ?

Il y a forcément conflit d’intérêts. J’étais avec Saër Seck lors de notre match à Diambars (25eJ.) et je lui ai directement posé la question. Je lui ai dit : ‘’Président, si vous êtes en face d’un partenaire qui vous dit : «J’ai un milliard à investir dans le football, je le mets dans votre club ou dans la Ligue ?», que choisiriez-vous ?’’ Il ne m’a pas répondu. Je lui ai dit que je choisirais Guédiawaye, parce que je suis dans une logique de club. Et si on a maintenant un président de ligue qui est autonome, il choisirait la Ligue. C’est cela qu’il faut qu’on règle. Aujourd’hui, il y a énormément de Sénégalais compétents qu’on peut prendre. Et moi, j’aimerais bien qu’on réfléchisse à la possibilité de mettre quelqu’un comme Pape Diouf. Si on parle de football professionnel au Sénégal, il n’y a pas meilleur. Il n’est pas dans un club ; il a connu le football professionnel, la gestion du football de haut niveau. Pourquoi n’irait-on pas lui demander de nous gérer en transition cette Ligue, pendant deux ans, avec des gens autonomes, indépendants, compétents dans les domaines de la communication, des finances, du marketing. Il y a plein de gens qui peuvent nous aider : Omar Guèye Ndiaye, l’ancien président de Ouakam et qui n’est plus dans un club, Louis Lamotte et nombre d’autres personnes aux compétences avérées. Même en dehors de cette sphère, énormément de gens peuvent nous aider à porter cette Ligue, la rendre autonome et indépendante, au service du football.

A dehors de ceux que vous venez de citer, d’autres pourraient-ils gérer la Ligue ?

Il y a plein de Sénégalais capables de la gérer. La Ligue gère des clubs qui sont des entreprises. Il y a plein de Sénégalais bien formés, compétents, sachant gérer et prendre les décisions idoines et à temps. Ce qui s’est passé à Diambars, quand on est allé jouer là-bas dimanche, si on avait une Ligue autonome, il y aurait eu des sanctions. Quand on joue dans ses installations et que l’équipe met 8 minutes à sortir avec un coup d’envoi retardé… Certains disent que c’est pour des affaires mystiques. Possible. Moi, je dis que c’est peut-être un calcul, car on peut se dire qu’il y a d’autres matchs qui se jouent et que si on commence avec un retard de 8 minutes, un match peut se décider. S’il y a zéro but partout et qu’on bat Guédiawaye dans les dernières, on est champions. C’est là où le bât blesse. Il faut des actes concrets, pour sanctionner quand il le faut. Un autre exemple : le terrain de Saly, ce n’est pas moi qui le dis- les autres présidents le disent tout bas, moi je le dis tout haut- ne devrait pas accueillir de matchs de Ligue 1. C’est des grilles partout, les gens sont debout, on ne peut même pas voir la ligne de touche quand on est en loge. Où est notre manuel pour valider et homologuer des terrains ? C’est un problème. On dit que c’est le terrain du président, on le valide. Peut-être que je me trompe, mais ce sont des choses que je trouve anormales et que nous devons revoir. Seule l’autonomie de gestion peut nous y conduire.

Est-ce à dire que Diambars est favorisé ?

C’est difficile à dire, parce que les arbitres sont là pour faire leur boulot et peuvent se tromper. Mais la faveur est dans le fait que le président de Diambars soit celui de la Ligue. Quand la Ligue avait décidé d’arrêter le Championnat, lors de la phase aller, des gens comme Gaston Mbengue (Ndiambour), Seydou Sané du Casa Sport, d’autres présidents que je ne peux pas citer et moi-même avions dit que c’était anormal, parce qu’à l’époque, les autres équipes carburaient et pas Diambars. On se demande s’il y aurait eu un arrêt du Championnat, si Saër n’était pas président de la Ligue. Cela pose sur la table les petites questions auxquelles il faut qu’on trouve des réponses.

Ne craignez-vous pas qu’on comprenne vos propos comme une volonté d’occuper le fauteuil des personnes que vous attaquez ?

C’est déjà dit. Ceux qui me connaissent savent que je n’ai même pas le temps pour Guédiawaye. Je ne suis même pas sûr d’avoir mis les pieds à notre siège, au stade, depuis le début de ce mois de juin. Je n’ai envie d’aucun fauteuil, je le dis ouvertement. Je veux tout simplement que le football soit géré de façon autonome. Et ça fait encore partie des choses que j’ai dites à Saër Seck (…). Je cherche tout simplement à faire en sorte que Saër lâche la présidence de la Ligue. Je ne serai ni à la Ligue ni à la Fédération. Par contre, s’il y a une association des clubs, je suis preneur, en tant qu’acteur et non président. Être président de Guédiawaye me suffit.

Qu’entendez-vous par association de clubs ?

Les clubs doivent se retrouver dans une association pour veiller à ce que le cahier des charges de la Ligue que nous avons mis en place soit respecté, parce qu’il y a trop de manquements dans le football. Je ne fais pas de déclarations gratuites et j’ai fait des tests. On nous demande chaque mois de donner la preuve que nos salaires sont payés. Mes salaires à Guédiawaye sont payés par virement bancaire, donc on ne peut pas tricher. Mais depuis fin 2015, Guédiawaye n’a pas donné à la Ligue la preuve du paiement de ses salaires. En principe, même si on est à jour avec nos salaires, on devrait nous considérer comme un club qui n’est pas en règle et nous sanctionner. Personne n’est venu nous demander pourquoi nous sommes en retard. Cela veut dire que beaucoup de clubs font dans la même situation. Si on est bons amis, on ne vérifie pas. C’est cela problème du football et il faut qu’on le règle.

«Il y a une recette de plus de 700 millions de Francs Cfa répartis sur la saison 2015/2016. Qu’on nous explique.»

 

Vous aviez interdit qu’un match soit filmé au stade Amadou Barry et vous n’êtes aussi convaincu des explications fournies sur le contrat. Pourquoi ?

Après le dernier Conseil d’administration de la Ligue pro, mon grand frère, Ndoffène Fall, est allé dans la presse pour justifier le contrat sur les droits de télévision, avec des chiffres qui me paraissent erronés. Quand il dit qu’ils ont un contrat signé en 2015 et qu’il y a eu des problèmes après, je suis surpris. Parce que ce contrat dont il parle, je l’ai entre les mains et l’ai envoyé à tous les présidents de clubs de Ligue 1 et Ligue 2, pour qu’ils voient qu’il a été signé en décembre 2014. Et sur la base de ce que j’y ai vu, il y a une recette de plus de 700 millions de Francs Cfa répartis sur la saison 2015/2016, avec un montant payé à la signature du contrat. Et quand je parle de 700 millions, je parle de chiffre d’affaires minimum garanti. Donc, qu’on nous dise si l’entreprise avec laquelle ils ont signé le contrat n’a pas respecté ses engagements. Qu’on nous l’explique. Et si elle les a respectés, qu’on nous explique aussi quelle est la clé de répartition de cet argent. Et tant que cela n’est pas clair et que je n’ai pas ces informations, aucun match ne sera filmé à Amadou Barry. Jamais. C’est clair et net. Ils ne peuvent me sanctionner. Sur quelle base ? On prend nos images et on les diffuse. Je n’ai pas peur des sanctions. Je n’ai pas peur d’être seul dans ce combat, parce que c’est un combat juste. Quand on est sur la voie de la vérité, on ne doit pas avoir peur et je suis animé par ces principes.

Vous exigez donc plus de transparence de la part de la Ligue de football professionnel ?

Quand on donne 2 millions FCfa à un club professionnel en début de saison – on ne sait même pas si c’est sur le contrat des droits télé ou celui d’Orange -, je pense qu’il faut que les choses soient transparentes. Puisque la Ligue joue la transparence, elle n’a qu’à communiquer sainement et montrer les contrats aux clubs. C’est pareil pour le contrat d’Orange. On nous fait jouer dans une Ligue 1 Orange, cela veut dire qu’il y a un naming et ça se paie. Qu’est-ce qu’on gagne ? 20 millions pour le champion. Si vous êtes 4e, vous n’avez rien, alors que vous avez dépensé beaucoup d’argent. J’aimerais que les clubs prennent leur courage à deux mains et qu’on aille défendre nos intérêts. C’est aussi pareil pour les footballeurs, parce que ce sont eux qui amènent les revenus et il faut qu’ils en soient conscients. Il faut que la Ligue nous édifie sur ces contrats et il ne peut pas y avoir de confidentialité pour un club qui joue en Ligue 1. Nous n’avons pas accès aux Pv ni du Bureau ni du Conseil d’administration et ce n’est pas normal.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici